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Le Siracide est le seul livre de la Bible dont l’auteur, Jésus Ben Sira, est clairement identifié grâce à sa signature dans la conclusion du livre. 

Une instruction d’intelligence et de savoir a été gravée en ce livre par Jésus fils de Sirakh, fils d’Eléazar, de Jérusalem, qui a déversé comme une pluie la sagesse de son cœur (Si 50,27).

Il s’agit d’un scribe sans doute important vivant à Jérusalem vers 200 av. J.-C. Son petit-fils a traduit ses écrits de l’hébreu au grec et édité autour de 130 av. J.-C., comme il le dit dans un prologue:

C’est pourquoi mon grand-père Jésus,

qui s’était adonné par-dessus tout à la lecture de la Loi, des Prophètes et des autres livres de nos pères, et qui y avait acquis une grande maîtrise, fut amené à écrire lui aussi sur l’instruction et la sagesse, afin que ceux qui aiment le savoir, s’étant familiarisés avec ces sujets, progressent encore davantage dans la vie selon la Loi. Vous êtes donc invités à en faire la lecture avec bienveillance et attention, et à montrer de l’indulgence s’il vous semble que nous avons échoué, malgré tous nos efforts, à rendre certaines expressions. Car les choses dites en hébreu dans ce livre n’ont pas la même valeur lorsqu’elles sont traduites en une autre langue.

 

L’Ecclésiastique est l’autre nom donné à ce livre, nom qui exprime clairement les destinataires visés, à savoir les communautés (ekklêsia) de croyants. 

Ben Sira écrit ce livre dans un contexte culturel dominé par la philosophie grecque et son ambition universaliste. Nous avons déjà noté chez les prophètes cette ouverture à l’ensemble des humains, mais après les difficultés de la période postexilique, la nécessité de sauvegarder l’identité du judaïsme a amené l’auteur à enraciner son enseignement dans la Loi et à souligner le caractère singulier de l’élection d’Israël et de ses exigences cultuelles. 

 

Le livre est partagé en deux grandes sections, la première (Si 1-42,14) est une collection de sentences et de poèmes didactiques sur la sagesse, la seconde (Si 42,15-51) est un hymne à la sagesse de Dieu qui se manifeste à la fois dans la nature et dans l’histoire du peuple d’Israël.

Sentences et Poèmes

Le Siracide reprend les fondamentaux du livre des Proverbes et son éloge de la sagesse.

Il souligne avec insistance la particularité de la sagesse juive, déjà notée dans le livre des Proverbes, à savoir la place centrale que tient la crainte de Yhwh qui est à la source de la sagesse.
La crainte de Yhwh est gloire et fierté, joie et couronne d’allégresse.
La crainte de Yhwh réjouit le cœur, donne joie, gaieté et longue vie.
Pour qui craint Yhwh, tout ira bien à la fin, au jour de sa mort, il sera béni.
Le commencement de la sagesse, c’est la crainte de Yhwh (Si 1,11-14a).

Elle procure assurance et prospérité.
La richesse et la force donnent confiance, mais plus encore la crainte de Yhwh.
Avec la crainte de Yhwh rien ne manque, avec elle il n’y a plus à chercher de secours. 
La crainte du Seigneur est comme un jardin luxuriant et mieux que toute gloire elle protège (Si 40,26-27).

Ben Sira reprend aussi la dimension féminine de la sagesse. Elle est comparée à la femme que l’homme doit rechercher, “draguer” pourrait-on dire aujourd’hui avec l’image du chasseur qu’il utilise.

Heureux l’homme qui s’applique à la sagesse et qui exerce son intelligence à raisonner,
qui en médite les voies dans son cœur et réfléchit sur ses secrets.
Il se lance à sa poursuite comme un chasseur, il se tient aux aguets sur son passage.
Il regarde par sa fenêtre, il écoute à sa porte. (…)

Il dresse sa tente auprès d’elle, il campe au séjour du bonheur. 
Il place ses enfants sous son abri, sous ses rameaux il demeure.
Il est abrité par elle de la chaleur, il campe dans sa gloire (Si 14,20-27).

 

La sagesse apparaît comme la face féminine de Yhwh, elle est accueillie par l’homme comme une future épouse, elle nourrit, abreuve les humains comme une mère son enfant.

Celui qui craint Yhwh agit en conséquence, celui qui est maître de la Loi atteindra la sagesse.
Elle viendra à sa rencontre comme une mère, comme une épouse vierge, elle l’accueillera ;
elle le nourrira du pain de l’intelligence, elle l’abreuvera de l’eau de la sagesse (Si 15,1-3).

 

La Sagesse, avec une majuscule (comme dans les chapitres 1 et 8 des Proverbes), proclame son propre éloge. (…) «Je suis sortie de la bouche du Très-Haut et comme une vapeur j’ai recouvert la terre. J’habitais dans les hauteurs du ciel et mon trône reposait sur la colonne de nuée » (Si 24,1-4).

Elle est aussi identifiée à la Parole créatrice des premiers versets de la Bible.

 

Cependant le mal est là. Comment concilier son existence avec cette foi en la Parole créatrice bonne et toute puissante ?

La sagesse a créé l’homme libre face à la Loi, de son choix découle la vie ou la mort.

Lui-même (Yhwh) a créé l’homme au commencement et l’a laissé à son propre conseil. Si tu le veux, tu peux observer les commandements, rester fidèle dépend de ton bon vouloir. Il a placé auprès de toi le feu et l’eau ;selon ton choix tu peux étendre la main. Aux hommes sont proposées la vie et la mort : à chacun sera donné selon son choix (Si 15,14-17).

 

C’est en lui-même, et non en Dieu que se trouve la source du mal. 

Quand un impie maudit son adversaire, c’est lui-même qu’il maudit (Si 21,27).

 

La réponse du Siracide à la question de la rétribution, du bonheur pour ceux qui font le bien et du malheur pour ceux qui font le mal, n’apporte pas d’éléments nouveaux. Il reste limité à l’horizon terrestre et sa conception du bonheur reste traditionnelle : santé, prospérité, renom et aisance. 

Une vie heureuse ne dure qu’un nombre limité de jours,
mais la bonne renommée demeure à jamais (Si 41,13).

De ce fait, face à la fatalité de la mort, il a parfois un ton un peu désabusé.

Toute chair vieillit comme un vêtement ; c’est la loi éternelle : « Tu dois mourir » (Si 14,17). 

Depuis celui qui est assis sur un trône illustre, jusqu’à celui qui est humilié sur la terre et la cendre, depuis celui qui porte la pourpre et la couronne jusqu’à celui qui est vêtu de toile grossière, ce n’est que fureur, jalousie, trouble et agitation, crainte de la mort, ressentiment et discorde. Et au moment où l’on repose sur son lit, le sommeil de la nuit ne fait que varier les soucis (Si 40, 3-5).

Hymne à la sagesse de Yhwh

La gloire et la sagesse de Yhwh se manifestent avec éclat dans la nature avec la course du soleil, les changements de la lune qui indique le temps, la beauté des étoiles, la splendeur de l’arc-en-ciel. Tous les phénomènes naturels sont sources d’admiration : le vent, la neige, les grêlons. Des merveilles s’échappent jusque dans les plus petits détails de la nature.

Que toutes ses œuvres sont désirables,
jusqu’à la plus petite étincelle qui se peut contempler (Si 42,22).

Devant tant de merveilles, l’auteur reste coi. 

Nous pourrions dire bien des choses sans arriver au bout,

le point final de nos discours, c’est : il est le tout (Si 43,27).

 

Mais la gloire de Yhwh se manifeste aussi dans l’histoire à travers les grands ancêtres d’Israël dont l’auteur fait l’éloge, depuis les patriarches jusqu’aux prophètes en passant par Moïse, les Juges, les Rois et les prophètes.   

Dans son éloge du prophète Élie, le Siracide entrevoit l’idée d’immortalité.

Quelle gloire tu t’es acquise, Élie, par tes prodiges ! 

Qui pourra tirer fierté de te ressembler ? 

Toi qui as fait lever un défunt de la mort 

et du séjour des morts par la parole du Très-Haut (Si 48, 4-5).

Heureux ceux qui t’ont vu 

et ceux qui se sont endormis dans l’amour, 

car nous aussi nous vivrons sûrement (Si 48, 11).

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