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Autres prophètes

Les autres « petits prophètes »

Nous terminons cette partie des livres prophétiques, avec les neuf petits prophètes restants que nous avons placés dans l’ordre chronologique de leurs interventions. Entre parenthèse est indiqué le nombre de chapitres qu’ils contiennent :

 Nahoum (3), Sophonie (3), Habaquq (3), Abdias (1), Aggée (2), Zacharie (14), Jonas (4), Joël (4) et Malachie (3).

Le livre de Zacharie est un cas particulier car à l’instar du livre d’Esaïe, il est composé de deux parties (1-8, 9-14). La première partie est rédigée au retour d’exil et la seconde près de 200 ans plus tard, donc rédigées par un autre auteur. 

Ces prophètes qualifiés de « petits prophètes » de par la taille de leurs écrits tiennent  néanmoins une place importante dans la Révélation. 

Nous relèverons en particulier les versets cités dans le Nouveau Testament. 

 

NAHOUM

Nahoum est un prophète dont l’activité se situe entre la destruction en 663 de Thèbes en Egypte par le roi assyrien Assurbanipal et la chute de Ninive en 612, capitale de l’immense empire Assyrien, réputée imprenable.

Ce livret commence par un hymne à Yhwh dont il célèbre à la fois la terrible exigence et la bonté. Yhwh est un Dieu exigeant et vengeur. (…) sa colère est terrible. Yhwh se venge de ses adversaires ; il s’enflamme contre ses ennemis (Na 1,2).
Il reprend la caractéristique de Yhwh donnée dans le livre de l’exode (Ex 34,6). Certes, Yhwh est lent à la colère et d’une grande puissance, mais Yhwh ne laisse rien passer (Na 1,3).
Le royaume de Juda, sous le règne de son roi Manassé (687-642), n’a pas été fidèle à Yhwh, des malheurs se sont abattus sur lui, mais Yhwh maintient sa promesse de venir à son secours. Si je t’ai humiliée, je ne t’humilierai plus. Maintenant, je brise son joug qui t’écrase et je détache tes liens (Na 1,12).

Yhwh enverra un messager (un messie) pour rétablir la paix. Sur les montagnes accourt un messager ; il annonce la paix. Célèbre tes fêtes, Juda, accomplis tes vœux ! Car l’être infernal ne passera plus jamais chez toi, il est complètement anéanti (Na 2,1).

 

La colère de Yhwh est dirigée contre les puissances de ce monde. Il prophétise la chute de Ninive. Cette cité qui terrorise le monde sera frappée à mort, livrée au carnage, elle subira le sort qu’elle a fait subir à Thèbes.

Où est-il, l’antre des lions ? (…) Le lion dépeçait pour gaver ses petits, il étranglait pour ses lionnes ; il emplissait ses tanières de rapines, ses antres de viande dépecée. Me voici contre toi– oracle de Yhwh de l’univers ! Oui, je vais réduire ses chars en fumée. Tes lionceaux, l’épée les dévorera (Na 2,12-14a).

La séduction qu’inspirent aux yeux des hommes les empires par leur apparente invulnérabilité sera la cause même de leurs malheurs à venir.  

A cause des multiples débauches de la prostituée, habile ensorceleuse, d’une grâce exquise, qui asservissait les nations par ses débauches, les peuplades par ses sortilèges, me voici contre toi– oracle de Yhwh ! Je retrousse ta jupe jusqu’à ta figure pour exhiber devant les nations ta nudité, devant les royaumes, ton infamie. Je te couvre d’ordures pour te flétrir et de toi, faire un exemple. Aussi, quiconque te voit s’enfuit en s’écriant : « Ninive est dévastée ! Qui aurait pour elle un geste de pitié ? » Pour toi, où chercherais-je des consolateurs ? (Na 3,4-7).

 

SOPHONIE

Le prophète Sophonie intervient sous le règne de Josias (640-609), une trentaine d’années après Nahum, contemporain du prophète Jérémie, il reprend le thème de la colère de Yhwh. Toute vie sur terre en subira les conséquences.  

Je supprimerai les hommes de la surface de la terre (So 1,3b).

Le prophète Sophonie décline la nature du Jour de Yhwh

Jour de fureur que ce jour, jour de détresse et d’angoisse,

jour de désastre et de désolation, jour de ténèbres et d’obscurité (So 1,15).

Texte qui a été repris dans le célèbre hymne du “Dies irae”, écrit au moyen-âge et chanté dans la liturgie à la messe du Requiem pour les morts. Cet hymne a trop souvent été utilisé dans une “pastorale de la peur”, pour imposer au peuple un ordre moral par la crainte de l’enfer et conforter ainsi l’ordre établi. Alors que le prophète vise moins le “petit peuple” que les inégalités sociales, l’accumulation par certains de la richesse, les mensonges des autorités, les cultes idolâtres, qui provoquent de terribles tragédies, car le peuple des marchands est anéanti, tous les peseurs d’argent sont supprimés (So 1,11).

Je jetterai les hommes dans la détresse, et ils marcheront comme des aveugles, car ils ont péché contre Yhwh. Leur sang sera répandu comme de la poussière, et leurs tripes comme des ordures. Ni leur argent ni leur or ne pourra les délivrer (So 1,17).

Sophonie donne à ce jour de Yhwh une dimension cosmique.
Au jour de la fureur de Yhwh, au feu de mon ardeur, toute la terre sera dévorée ; car il va faire l’extermination – et ce sera terrible – de tous les habitants de la terre (So 2,17).

Mais les petits, ceux qui souffrent de l’injustice, pourront se tourner vers Yhwh.

Recherchez Yhwh, vous tous les humbles de la terre (So 2,3).

Yhwh promet la restauration d’un “petit reste ». 

Je maintiendrai au milieu de toi, Israël, un reste de gens humbles et pauvres (So 3,12).

Un nouveau peuple, composé des « humbles de la terre », verra le jour tandis que les arrogants disparaîtront.

Ce sera au temps où je vous rassemblerai ;

votre renom s’étendra, 

et je vous mettrai à l’honneur parmi tous les peuples de la terre 

quand, sous vos yeux, je changerai votre destinée (So 3,20).

Le livre se termine sur une note d’espérance et de joie, avec la vision du peuple qui danse dans une Jérusalem en fête (So 3,14-20).

 

HABAQUQ

Le prophète Habaquq écrit à la période cruciale et douloureuse qui précède la déportation à Babylone en 597. Israël est en butte aux menaces des chaldéens et craint pour sa survie. 

Dans une vision qui annonce les catastrophes à venir, Habaquq en appelle à Dieu contre Dieu lui-même et ses promesses. Jusqu’où, Yhwh, mon appel au secours ne s’est-il pas élevé ? Tu n’écoutes pas. Je te crie à la violence, tu ne sauves pas. Pourquoi me fais-tu voir la malfaisance ? Acceptes-tu le spectacle de l’oppression ? En face de moi, il n’y a que ravage et violence (Ha 1,2-3). 

Pourquoi donc acceptes-tu le spectacle des traîtres, gardes-tu le silence quand un méchant engloutit plus juste que lui (Ha 1,13b).

Après cette attaque contre Yhwh, Habaquq attend de pied ferme sa réponse.  

Je tiendrai bon à mon poste de garde, je resterai debout sur les retranchements. Je guetterai pour voir ce qu’il dira contre moi et ce que je répondrai au rappel à l’ordre (Ha 2,1).

Yhwh répond en rappelant sa fidélité tout au long de l’histoire d’Israël et parle d’une échéance où, en final, l’orgueil des puissants se retournera contre eux. Le juste doit attendre.

Yhwh m’a répondu, il m’a dit : Écris une vision, grave la sur des tablettes pour que le lecteur y coure. (…) Si elle tarde, attends la, oui elle viendra, elle ne tardera pas. Voici le conquérant plein d’orgueil, il ignore la droiture, mais un juste vit par sa fidélité (Ha 2,2-4).

Face à l’orgueil des puissants, la bonne réponse du juste est la fidélité à Yhwh.

Le prophète prononce alors cinq malédictions contre les empires qui prennent ce qui n’est pas à eux et causent la fin de nombreux autres peuples. 

MALHEUR ! Il ( le conquérant) accumule ce qui n’est pas à lui ! Jusques à quand ? (…) Comme tu as pillé des nations en nombre, tout le reste des peuples te pillera, à cause du sang humain, à cause de la violence faite au pays, à la cité et à tous ses habitants. (…) C’est la honte de ta maison que tu as décidée : causer la fin de peuples en nombre est une atteinte à ta propre vie (Ha 2,6b-10).

Il exhorte le peuple à rester fidèle à son Dieu au sein même de tous ces événements tragiques. 

En revanche, Yhwh est dans son temple saint : Silence devant lui, terre entière (Ha 2,20).

 

Le dernier chapitre est une vision du prophète sous le mode apocalyptique où la venue de Yhwh pour détruire les empires bouleverse toute la nature. Le juste, lui, doit persévérer et attendre. A la fin, il sera sauvé et exultera de joie.  

Je suis tout décomposé. Je reste sur place, bouleversé. Car je dois attendre sans bouger le jour de la détresse, pour monter vers le peuple qui nous assaille. Oui, le figuier ne fleurit pas, les vignes ne rapportent rien, la culture de l’olivier trompe l’attente, les champs ne donnent rien à manger, le petit bétail disparaît des bergeries, il n’y a plus de gros bétail dans les étables. Moi, je serai dans l’allégresse à cause du Yhwh, j’exulterai à cause du Dieu qui me sauve. Yhwh est mon seigneur, il est ma force, il rend mes pieds comme ceux des biches et me fait marcher sur mes hauteurs (Ha 3,16b-19).

 

La phrase du prophète cité plus haut “un juste vit par sa fidélité“ sera reprise à trois reprises par l’apôtre Paul (Rm 1,17 ; Ga 3,11 ; He 10,38), pour signifier que le salut vient de la fidélité, c’est à dire de la foi, de la confiance et non du mérite de nos actions. 

Dans son conflit théologique avec le Vatican au sujet du salut – vient-il de la foi ou des œuvres?- Martin Luther, en 1517, dénonçant la pratique des indulgences qui permettrait au croyant de gagner son salut moyennant finance, a placé ce verset en exergue dans son “commentaire de l’épître aux Romains”. 

ABDIAS

Le livre d’Abdias qui ne comporte qu’un chapitre est le plus court de la Bible. C’est un oracle contre le peuple d’Edom, qui a pour ancêtre Esaü. Dans le même esprit que nous avons vu chez Jérémie (Jr 49), Yhwh dénonce l’arrogance d’Edom qui a cherché à tirer profit de la chute de Jérusalem s’accaparant les maisons des déportés en 587. Abdias annonce la venue d’un jour de Yhwh menaçant pour toutes les nations (Ab 1,15).

C’est un message d’espoir pour le reste d’Israël tandis qu’Edom sera totalement détruit.

Mais sur la montagne de Sion se réfugient des rescapés,elle redevient sainte. Les gens de Jacob spolient ceux qui les ont spoliés. Les gens de Jacob deviennent un feu,et ceux de Joseph une flamme.Mais les gens d’Esaü deviennent du chaume.Ceux-là les embrasent et les consument : aucun survivant ne reste à Esaü (Ab 1,17).

JONAS

Le livre de Jonas, classé dans les petits prophètes, est très particulier en ce sens qu’il se présente moins comme une série d’oracles que comme un récit assez légendaire d’un certain Jonas qui a reçu l’ordre d’aller prophétiser à Ninive la catastrophe de la ville. Terrifié par cette mission, il fuit et embarque sur un bateau qui part en direction de Tarsis à l’opposé de Ninive. Une tempête met en danger le bateau et tous les passagers prient leurs dieux. Jonas est désigné comme le coupable et celui-ci, acculé à avouer sa faute, est jeté à la mer.

Alors Yhwh dépêcha un grand poisson pour engloutir Jonas. Et Jonas demeura dans les entrailles du poisson, trois jours et trois nuits. Des entrailles du poisson, il pria Yhwh, son Dieu (Jon 2,1-2). 

Il dit : Dans l’angoisse qui m’étreint, j’implore Yhwh : il me répond; 

du ventre de la Mort, j’appelle au secours : tu entends ma voix (Jon 2,3).

Après la prière de Jonas qui reprend plusieurs passages de psaumes, Yhwh commanda au poisson, et aussitôt le poisson vomit Jonas sur la terre ferme (Jon 2,11).

Jonas se rend alors à Ninive et annonce la catastrophe prochaine de la ville, mais les habitants en l’entendant se convertissent.

Or Ninive était devenue une ville excessivement grande : on mettait trois jours pour la traverser. Jonas avait à peine marché une journée en proférant cet oracle : « Encore quarante jours et Ninive sera mise sens dessus dessous », que déjà ses habitants croyaient en Dieu (Jon 3,3b-5a).

Dieu pardonne et la catastrophe annoncée par Jonas ne se produit pas. Contredit dans sa prophétie, Jonas le prit mal, très mal, et il se fâcha (Jon 4,1).

A l’aide d’une parabole, Yhwh lui fait comprendre que pardonner à cent vingt mille personnes est tout de même plus important que de conforter le dire d’une personne ! 

 

Dans les évangiles, Jésus fait référence à ce récit en réponse aux pharisiens qui lui demandent un signe, c’est-à-dire une action spectaculaire pour prouver que sa puissance vient de Dieu. Jésus refuse de faire un prodige et leur répond : En fait de signe, il ne lui en sera pas donné d’autre que le signe du prophète Jonas. Car tout comme Jonas fut dans le ventre du monstre marin trois jours et trois nuits, ainsi le Fils de l’homme sera dans le sein de la terre trois jours et trois nuits.  Lors du jugement, les hommes de Ninive se lèveront avec cette génération et ils la condamneront, car ils se sont convertis à la prédication de Jonas ; eh bien ! ici il y a plus que Jonas (Mt 12,38; 16,4).

Ce signe, énigmatique pour ses interlocuteurs, est donc double. D’une part, Jésus annonce sa mort et sa résurrection, et d’autre part il laisse entendre qu’offrir le salut à tous les païens est plus important que de conforter les religieux dans leur assurance d’être des privilégiés. 

 JOËL

Nous ne savons rien du prophète Joël. Nous ne connaissons de cet auteur, ni son origine, ni sa fonction, ni même l’époque de son intervention. Les allusions à des calamités naturelles ou à des tragédies guerrières peuvent renvoyer à différentes époques. 

Le livre commence par une terrifiante invasion de sauterelles qui dévorent tout sur leur passage.

La vigne est étiolée, le figuier flétri ; grenadier, palmier, pommier, tous les arbres des champs sont desséchés. La gaieté, confuse, se retire d’entre les humains (Jl 1,12).

 

Cette dévastation radicale de la terre est associée au jour de Yhwh, thème central du livre.

Grand est le jour de Yhwh, redoutable à l’extrême : qui peut le supporter ? (Jl 2,11)

Ce jour dévastateur dépouillera l’homme de toutes ses certitudes et de son arrogance.
Déchirez vos cœurs, non vos vêtements et revenez à Yhwh, votre Dieu : il est bienveillant et miséricordieux, lent à la colère et plein d’une bonté fidèle (Jl 2,13).

Ainsi dépouillé de sa suffisance, l’homme pourra accueillir le don de Yhwh.

Yhwh répond à son peuple :« Eh bien ! Je vais vous envoyer le blé, le moût et l’huile fraîche. Vous en serez rassasiés. Jamais plus je ne ferai de vous un opprobre parmi les nations »  (Jl 2,19).

L’homme recevra l’Esprit qui lui apportera le salut.

Après cela, je répandrai mon Esprit sur toute chair (Jl 3,1).

 Alors, quiconque invoquera le nom de Yhwh sera sauvé. En effet, il y aura des rescapés sur la montagne de Sion et à Jérusalem, comme Yhwh l’a dit, parmi les survivants que Yhwh appelle (Jl 3,5).

Ce salut se traduira par la connaissance de Yhwh et l’entrée dans sa demeure. 

Alors vous connaîtrez que je suis Yhwh, votre Dieu, qui demeure à Sion, ma montagne sainte. Jérusalem deviendra un lieu saint (Jl 4,17).

Le jour de Yhwh apparaît ainsi, de façon concomitante, comme le jugement des nations et le salut du peuple qui fait confiance en lui. 

 

AGGÉE

Le message prophétique d’Aggée se situe très exactement entre août et décembre 520, après le décret de Darius en 538 autorisant les juifs déportés à Babylone à rentrer à Jérusalem et à reconstruire le temple. 

L’an deux du règne de Darius, le sixième mois, le premier jour du mois, la parole de Yhwh fut adressée par l’intermédiaire d’Aggée, le prophète, à Zorobabel, fils de Shaltiel, le gouverneur de Juda, et à Josué, fils de Yehoçadaq, le grand prêtre : « Ainsi parle Yhwh de l’univers : Ces gens-là déclarent : Il n’est pas venu, le moment de rebâtir la Maison de Yhwh» (Ag 1,1-2).

Les premières tentatives de reconstruction du temple en 537 (cf Esd 3,7-12), se heurtèrent à l’hostilité de la population samaritaine et au manque de moyens, si bien que les travaux furent arrêtés. Aggée intervient alors pour stimuler la population retombée dans une sorte de léthargie spirituelle. En se remettant au travail, en retrouvant la confiance en Yhwh, les bénédictions tomberont sur eux et le temps du salut viendra. L’ébranlement du cosmos et le renversement des puissances seront le signe du renouveau.

La parole de Yhwh fut adressée une seconde fois à Aggée, le vingt-quatre du mois : « Parle à Zorobabel, le gouverneur de Juda, et dis-lui : Je vais ébranler ciel et terre. Je vais renverser les trônes des royaumes et exterminer la force des royaumes des nations ; je vais renverser chars et conducteurs ; chevaux et cavaliers tomberont, chacun sous l’épée de son frère. (…) Je t’établirai, (…) car c’est toi que j’ai élu – oracle de Yhwh de l’univers » (Ag 2,21-23).

 

ZACHARIE 

Dans la première partie du livre (Za 1-8), le prophète Zacharie, contemporain d’Aggée, exhorte aussi à la reconstruction du temple, il exerce son ministère entre 520 et 518, trois ans avant la dédicace du second temple, en 515.

Il rapporte huit visions avec des figures de style qui seront reprises plus tard dans la littérature apocalyptique: des chevaux, des cornes, un cordeau, un livret… pour exprimer que Yhwh n’a pas abandonné les siens, malgré les épreuves de l’exil et les difficultés matérielles présentes.
Zorobabel, le chef des exilés de retour à Jérusalem, devenu gouverneur de la province de Judée, porte une mission de renouvellement par l’Esprit. 

Alors il reprit et me dit : C’est ici la parole que Yhwh adresse à Zorobabel : Ce n’est ni par la puissance ni par la force, mais c’est par mon esprit, dit Yhwh des armées (Za 4,6).

Renouveau qui se concrétise par la reconstruction du temple.

Qui donc dédaignait le jour des modestes débuts ?Qu’on se réjouisse en voyant la pierre de fondation dans la main de Zorobabel (Za 4,10).

Ce renouveau est conditionné au soin de ses frères les plus démunis.

La parole de Yhwh fut adressée à Zacharie en ces termes : « Ainsi parlait Yhwh  : Prononcez des jugements véridiques, et que chacun use de loyauté et de miséricorde à l’égard de son frère. La veuve et l’orphelin, l’émigré et le pauvre, ne les exploitez pas ; que personne de vous ne prémédite de faire du mal à son frère (Za 7,8).

La deuxième partie du livre (Za 9-14) ne peut être l’œuvre du même auteur, car il est fait état de la chute de Tyr (Za 9,1-8) par Alexandre le grand en 332 et les grecs (Yavân) sont désignés comme les ennemis du peuple.

Rentrez dans la place forte, captifs pleins d’espérance. (…) Je vais exciter tes fils, Sion,

– contre tes fils, Yavân – et je te brandirai tel un héros son épée.

Yhwh au-dessus d’eux apparaîtra et sa flèche jaillira comme l’éclair (Za 9,12-14a).
Les périodes de grandes épreuves ont toujours constitué pour le peuple des moments d’intenses réveils religieux : ainsi l’invasion de Sennakérib au temps d’Esaïe, le renouveau consécutif à l’exil, puis, bien plus tard encore, celui que provoqua la persécution maccabéenne qui inspira le livre de Daniel

Le livret est tout entier consacré à l’évocation de l’achèvement messianique. Après avoir annoncé l’intervention puissante de Yhwh, le Deutéro-Zacharie donne du messie plusieurs visages:

Celui d’un roi humble qui, par son programme de pacification universelle, est dans la continuité de l’idéal royal de David et Salomon.
Tressaille d’allégresse, fille de Sion !Pousse des acclamations, fille de Jérusalem ! Voici que ton roi s’avance vers toi ; il est juste et victorieux, humble, monté sur un âne– sur un ânon tout jeune. (…) Il brisera l’arc de guerre et il proclamera la paix pour les nations (Za 9,9-10a).

Celui du bon berger en opposition avec les mauvais bergers qui trafiquent pour tirer des brebis le meilleur prix en les conduisant à l’abattoir. 
Je fis donc paître le troupeau que les trafiquants vouaient à l’abattoir. Je pris deux houlettes. J’appelai la première Faveur et la seconde Entente, et je me mis à paître le troupeau. Puis je supprimai les trois bergers en un seul mois (Za 11,7-8a).
Cette image du bon berger est reprise du chapitre 34 du livre du prophète Ezéchiel. 

Le troisième visage du messie, plus énigmatique, est celui du Transpercé :
Ce jour-là, je m’appliquerai à exterminer tous les peuples venus attaquer Jérusalem. Et je répandrai sur la maison de David et sur l’habitant de Jérusalem un esprit de bonne volonté et de supplication. Alors ils regarderont vers moi, celui qu’ils ont transpercé. Ils célébreront le deuil pour lui, comme pour le fils unique. Ils le pleureront amèrement comme on pleure un premier-né (Za 12, 9-10).

 

Yhwh semble profondément atteint par cette mort comme pour un fils unique. Cette figure mystérieuse rappelle le Serviteur souffrant du livre du prophète Esaïe (Es 53,5). Comme pour le Serviteur, le sacrifice du Transpercé, poignardé ou déshonoré (selon les traductions), est source de transformation des cœurs et de purification.
Ce jour-là, une source jaillira pour la maison de David et les habitants de Jérusalem, en remède au péché et à la souillure (Za 13,1).
Cette mort symbole de dépouillement et d’échec annonce un bouleversement cosmique sur le Mont des Oliviers près de Jérusalem.  

En ce jour-là, ses pieds se poseront sur le mont des Oliviers, qui est en face de Jérusalem, à l’orient. Le mont des Oliviers se fendra par le milieu, d’est en ouest, changé en une immense vallée (Za 14,4).

Tel sera le signe paradoxal de la gloire de Yhwh.
Alors Yhwh se montrera le roi de toute la terre. En ce jour-là, Yhwh sera unique et son nom unique (Za 14,9).

Les images de la figure messianique donnée par Zacharie avec l’arrivée sur un ânon (Mt 21,5), le  bon berger (Jn 10,11), le transpercé (Jn 19,37), le mont des Oliviers (Lc 22,39), seront pour les évangélistes autant de signes identifiant Jésus, au messie annoncé. 

 

MALACHIE

La prédication du prophète Malachie, le dernier dans le recueil des douze « petits » prophètes, se situe entre la fin de la reconstruction du temple puisque le culte y fonctionne, et l’arrivée du prêtre Esdras, soit entre 480 et 460. Après les prophéties d’Aggée et de Zacharie, l’accomplissement de la promesse liée à la reconstruction du temple (515) est espéré. Mais l’attente se prolonge et le scepticisme s’installe dans les esprits. Malachie réagit contre cette démission en particulier celle des prêtres.
Maintenant, à vous, prêtres, cet avertissement : (…) Oui, je maudis vos bénédictions, car aucun de vous ne prend rien à cœur. Me voici, je vais porter la menace contre votre descendance. Je vous jetterai du fumier à la figure, le fumier de vos fêtes ; et on vous enlèvera avec lui (Ml 2, 1-3).

Il rappelle l’alliance de Yhwh avec la tribu de Lévi, à laquelle fut réservée la fonction sacerdotale (Dt 10,8).

Mon alliance avec lui était vie et paix, (…) Sa bouche donnait un enseignement véridique et nulle imposture ne se trouvait sur ses lèvres. Dans l’intégrité et la droiture, il marchait avec moi, détournant beaucoup d’hommes de la perversion. En effet, les lèvres du prêtre gardent la connaissance, et de sa bouche on recherche l’instruction, car il est messager de Yhwh. Vous, au contraire, vous vous êtes écartés du chemin. Vous en avez fait vaciller beaucoup par votre enseignement.(…) A mon tour, je vous rends méprisables et vils à tout le peuple, dans la mesure où vous ne suivez pas mes voies et où vous faites preuve de partialité dans vos décisions (Ml 2, 5-9).

Malachie condamne aussi le comportement des hommes avec leurs femmes. Que personne ne soit traître envers la femme de sa jeunesse. En effet, répudier par haine, dit Yhwh, le Dieu d’Israël, c’est charger son vêtement de violence, dit Yhwh de l’univers. Respectez votre vie. Ne soyez pas traîtres (Ml 2,15-16).
Il annonce un jugement sur la base d’un ordre spirituel et social. Je m’approcherai de vous pour le jugement. Je serai un prompt accusateur contre les magiciens et les adultères, contre les parjures, contre ceux qui exploitent l’ouvrier salarié, la veuve et l’orphelin, qui oppriment l’émigré et ne me craignent pas, dit Yhwh de l’univers (Ml 3,5) .
Alors vous verrez à nouveau la différence entre le juste et le méchant, entre celui qui sert Dieu et celui qui ne le sert pas. Car voici que vient le jour, brûlant comme un four. Tous les arrogants et les méchants ne seront que paille (Ml 3,18-19).

Mais en final du livre, avant la venue de ce jour redoutable, Malachie ouvre une perspective lumineuse avec la venue sur terre d’Élie. Voici que je vais vous envoyer Élie, le prophète, avant que ne vienne le jour de Yhwh, jour grand et redoutable. Il ramènera le cœur des pères vers leurs fils, celui des fils vers leurs pères pour que je ne vienne pas frapper la terre d’interdit (Ml 3,23-24).
Ce retour d’Élie a été perçu comme réalisé en la personne de Jean-Baptiste (Mt 17,10-13).